Sommaire
1945 : un compromis fondateur
La cotisation patronale est créée comme contribution du capital au financement social.
Ambroise Croizat parle de « salaire socialisé » : une partie de la valeur ajoutée est prélevée via des caisses et redistribuée sous forme de droits (ex. allocations familiales), reconnaissant aussi des activités non salariées comme
le travail domestique.
Ce mécanisme fixe le partage de la valeur ajoutée autour de 65 % pour le travail, 35 % pour le capital.
Un équilibre instable
Comme l’a montré Thomas Piketty, la valeur ajoutée croît avec l’inflation et la productivité, mais cette croissance n’est pas intégralement répercutée sur les salaires.
Résultat : la part du capital se renforce, et le compromis 65/35 glisse progressivement vers 60/40.
Dans ce contexte, la cotisation patronale, finit par peser entièrement sur la part des salaires.
Un autre déséquilibre apparait avec la mondialisation.
Alors que les petites entreprises perdent en part de capital les grosses gagnent.
Le rapport passe d’un 60/40 général à 80/20 pour les tpe et 20/80 pour les gafam.
Les ordres de grandeur
La part des salaires + cotisations a baissé de –5 points de la valeur ajoutée depuis les années 1980.
Soit environ 120 milliards €/an.
- Individuellement : cela représente pour chaque salarié Français ≈ 100 €/mois manquants sur une fiche de paie.
- Collectivement : 120 milliards €/an
Soit l’équivalent du budget de l’Éducation nationale, ou le double de celui de l’Hôpital public . - C’est aussi 6 à 10 fois la taxe Zucman
Stabiliser le partage capital/travail
La CVA ne fixe pas directement le SMIC ni la part des salaires. Mais en socialisant une part de la VA en fonction des salaires, elle stabilise l’équilibre entre capital et salaires/cotisations, ce qui empêche que les profits absorbent toute la croissance.
En déplaçant l’assiette elle fait contribuer toute la valeur ajoutée.
Cette idée fait écho à plusieurs penseurs : Paul Boccara (PCF, Économie & Politique), Bernard Friot (Salaire à vie), Mariana Mazzucato (innovation publique, services collectifs).
- En ce sens, la CVA une règle de partage claire et transparente, qui limite la dérive capitaliste vers la concentration des profits.
comment fixer les limites ?
La CVA agit comme un régulateur du partage capital/travail : elle limite la part captée par le capital dans les grandes structures et soutient mécaniquement celles des petites.
Un exemple parlant est la comparaison entre Leclerc (≈ 60/40) et Carrefour (≈ 70/30). À chiffre d’affaires équivalent, Leclerc emploie davantage de salariés tout en affichant des prix plus bas. Pourtant, dans le langage économique dominant, c’est Carrefour — qui optimise son « coût du travail » — qu’on présente comme plus « compétitif ».
À nous de décider quel modèle économique nous voulons encourager : celui d’entreprises coopératives, ancrées dans l’emploi et le territoire, ou celui d’entreprises cotées en bourse, focalisées sur la rentabilité du capital.
En clair
En clair
La CVA, c’est changer la base de nos cotisations sociales : au lieu de peser uniquement sur les salaires, elles sont assises sur la richesse réellement produite, la valeur ajoutée.
Mais ce n’est pas tout : le dispositif est modulé en fonction de la masse salariale.
👉 Les entreprises qui embauchent et font vivre l’économie locale voient leur taux de cotisation allégé.
👉 Celles qui privilégient la rente, l’automatisation ou l’externalisation contribuent davantage.
Ainsi, on sécurise le financement de la Sécurité sociale tout en rétablissant un partage plus équilibré entre salaires et profits.
A retenir :
📢 « Exprimer les salaires en % de la valeur ajoutée, c’est la seule manière d’éviter les trompe-l’œil. Un salaire peut augmenter en euros, tout en reculant dans le partage de la richesse. »
L’analyse par le bais de la VA permet de mieux appréhender le partage des richesses et les inégalités.